1ER MAI: une fusion entre artisanat et culture hip-hop
Par Angèle Simon
Temps de lecture: 4mins
Situé sur la rue Chabanel, dans la Cité de la mode à Montréal, l’atelier d’Ysaline respire la créativité, le zen et la bonne ambiance. C’est ici que nous l’avons rencontrée, au milieu des morceaux de jeans récupérés, des patrons bien coupés et de sa nouvelle collection, dont elle faisait d’ailleurs la production. Accompagnée d’un petit fond de musique old school hip-hop, la créatrice commence à nous raconter son parcours en tant que designer.
L’exploration du tissu
Née en France, Ysaline a grandi au Québec et a commencé à coudre avec sa mère, à l'âge de 13 ans. Elle a tout de suite été très intriguée par le côté manuel de la couture ainsi que son médium: le tissu. Après avoir effectué des études dans un autre domaine, Ysaline est finalement retournée à l’école afin d’approfondir ses connaissances en couture. C’est au Cégep Marie-Victorin, en design de mode, option fourrure, qu’elle a effectué son programme. Graduée en 2014, la créatrice a ensuite travaillé pour plusieurs entreprises avant d’officiellement lancer sa propre marque, en 2021.
Par contre, c’est en 2017, que la créatrice a commencé à explorer son identité créative, grâce au jean. Les gens de son entourage lui donnaient des tonnes de jeans plus portables afin qu’elle puisse les réutiliser dans ses designs. C’est de là qu’est partie sa passion pour ce tissu, utilisé dans plusieurs de ses toutes premières créations.
De l’artisanat au recyclage
Ysaline se perçoit comme une artisane, plutôt qu’une simple créatrice de vêtements. Depuis ses débuts, elle explore les matériaux et les techniques artisanales telles que le tissage, le macramé, la broderie ou encore le patchwork, tout en les intégrant à des vêtements fonctionnels et intemporels.
“L’artisanat est vraiment au cœur de ma pratique, le côté manuel va toujours ressortir quelque part, même dans un vêtement simple.”
Le savoir-faire est un aspect important de son processus créatif.
La designer veille à garantir un ajustement parfait, assurant ainsi que ses créations conviennent à chacun. Elle offre également de réaliser tous les modèles selon les mesures des clients. Chaque morceau est cousu soigneusement par les mains d’Ysaline et cela va même jusqu’au petites tresses de denim qu’on peut retrouver sur quelques-unes des pièces signées 1ER MAI. C’est d’ailleurs une partie de son travail qu’elle souhaite davantage explorer en apprenant de nouveaux savoir-faire ou en collaborant avec d'autres artistes du coin.
Ysaline recycle tout. Des tissus militaires aux vieux jeans importables, jusqu’aux petits fils, la designer transforme tout ce qu’elle trouve en véritables merveilles. En général, les gens pensent souvent au recyclage comme quelque chose de pas très esthétique, un peu mauvais goût. Mais avec 1ER MAI, Ysaline souhaite déconstruire les croyances liées à cette pratique.
“J’ai envie de redonner au recyclage ses lettres de noblesse. Souvent, on pense au recyclage comme quelque chose de peu qualitatif, tout croche, mais j’ai envie d’élever ça pour que ça parle aussi aux gens qui aiment la mode.”
Un mix d’influences
1ER MAI est un beau mélange de styles fonctionnels, épurés, sobres, d’inspirations asiatiques ou encore hip-hop. Dans la nouvelle collection, on retrouve une veste inspirée du kimono, fabriquée dans du tissu recyclé qui, à la base, a été produit au Québec en 1989, pour l’armée canadienne. Ysaline a toujours puisé ses inspirations dans les uniformes militaires, mais aussi dans les vêtements de travail et la culture hip-hop. D’ailleurs, le nom 1ER MAI n’est pas un choix anodin. C’est la date de la fête du travail dans plusieurs pays ainsi que le symbole du printemps dans plein de calendriers. En plus d’être une déclaration sur les droits des travailleurs ainsi que le renouveau, 1ER MAI est également une réaction à la fast fashion.
La marque est donc un mix de plusieurs influences, qui parfois, se retrouvent toutes dans une pièce de vêtement, comme le bomber jacket. Cette veste est très importante pour la créatrice, car c’est avec celle-ci qu’elle a commencé à coudre. C’est aussi un vêtement qui a transcendé les époques et les milieux sociaux: le bomber jacket est la première pièce de vêtement de l’armée ayant transitionnée pour être portée par les civils, dont les artistes hip-hop.
Mais le plus important pour Ysaline, c’est de s’intéresser aux gens qui l’entourent et de comprendre comment ils se sentent quand ils portent ses vêtements.
“Chaque vêtement va tomber différemment sur quelqu’un, et pour moi, c’est comme une étude perpétuelle.”
Une certaine responsabilité
Pour Ysaline, être designer vient également avec une certaine responsabilité.
Une responsabilité d’essayer de bien faire les choses, de sensibiliser les consommateurs, de faire des produits de qualité, qui respectent la planète et les personnes. Aujourd’hui, il y a tellement de zones grises dans l’industrie de la mode qu'il est difficile pour les consommateurs de s’y retrouver et de bien faire les choses en tout temps. Ysaline pense donc que la consommation responsable passe par la valeur qu’on attribue à un vêtement.
“Pour moi, une façon plus responsable de consommer, ça commence avec notre rapport au vêtement.”
Que ce soit une robe dénichée en friperie, le manteau de votre grand-mère ou une pièce de designer, ce qui compte vraiment, c’est la signification que vous portez à cette pièce de vêtement et le soin que vous allez lui porter. Alors la prochaine fois que vous vous procurez une nouvelle pièce, pensez à cela !
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